Sahel : l’Europe s’implique, les Etats-Unis traînent des pieds.

La France n’est plus seule à supporter le fardeau de son engagement anti-jihadiste au Sahel. Mais les Etats-Unis, il y a encore quelques années parangons de la lutte anti-terroriste, refusent de contribuer à la force G5 Sahel. 

L’ONU envoie aujourd’hui des Casques bleus dans 15 pays troublés, situés essentiellement en Afrique et au Moyen-Orient. Sa mission au Mali, la Minusma, est de loin la plus dangereuse. Depuis sa création, en 2013, elle a déploré plus de pertes (près de 150 morts et 500 blessés graves) que la totalité des 14 autres missions de maintien de la paix réunies. Malgré son volume de près de 15 000 personnes, elle ne réussit pas à supprimer les exactions des jihadistes qui presque quotidiennement « frappent, violent, blessent et tuent presque impunément ».

La Minusma est une force complexe et lourde qui peut protéger partiellement des zones urbaines, mais qui ne peut guère aller à la recherche de jihadistes dispersés sur des territoires sans fin et se jouant des frontières. Cette recherche est beaucoup plus du domaine des militaires français engagés, depuis janvier 2013, à la demande du président Hollande dans les opérations Serval puis Barkhane. Mais eux non plus, malgré leur valeur et leur matériel, ne peuvent venir à bout de tous les jihadistes qui sévissent dans l’immense bande sahélienne.

La France a besoin d’être aidée par l’Europe et par l’ensemble de la communauté internationale. C’est ce que serine le président Macron depuis son élection. Et il commence à être écouté. Le sommet « G5 Sahel » tenu à Bruxelles vendredi dernier donne quelques espoirs de « fardeau partagé ». Cinquante pays se sont engagés à donner 414 millions d’euros à la force créée par cinq grands Etats sahéliens : Tchad, Burkina, Mali, Niger et Mauritanie. Cette force, le G5 Sahel, dont la base de commandement se trouve au centre du Mali, va bientôt comporter 5 000 hommes répartis en cinq bataillons. Leur efficacité opérationnelle reste encore inconnue mais, même si elle se cantonne dans les actions humanitaires et de développement, elle sera fort utile pour que la France se sente moins seule et surtout pour que l’amélioration des conditions de vie au Sahel annule une des raisons du développement de l’idéologie des jihadistes.

Ce premier engagement, essentiellement européen, ne sera vraiment significatif que si l’Algérie et le Nigeria s’impliquent dans la force et surtout si l’ONU s’engage à la soutenir complètement. Antonio Guterres, le secrétaire général le souhaite profondément mais, pour des raisons obscures, les Etats-Unis s’y montrent opposés. Ils ont bien voulu admettre que la Minusma apporte éventuellement son aide logistique, mais simplement à l’intérieur du Mali et sans aucune collaboration opérationnelle. Les Etats-Unis sont fortement impliqués au Nigeria où ils entretiennent une force de 800 hommes, ils participent honorablement à la Minusma au Mali, mais ils ne veulent pas mettre les pieds au Sahel.

Quant on a critiqué leur interventionnisme mondial, il est certes difficile de leur reprocher de ne pas s’engager plus dans une zone aussi compliquée, mais il est difficile de comprendre pourquoi ils empêchent indirectement d’autres membres de l’ONU de le faire.

Bizarre !

Par le général Etienne Copel

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