«Moi, Nicolas Jenson libraire à Venise en 1470». La note de lecture de Jean-Louis Gouraud.

«Moi, Nicolas Jenson libraire à Venise en 1470 » vient de sortir aux éditions Liralest/Le Pythagore. Jean-Louis Gouraud l’a lu pour La Revue pour l’intelligence du monde.

L’amour des livres (et des femmes)

Si le roi Charles VII n’a pas laissé dans l’Histoire le souvenir d’un très grand roi, il faut pourtant lui reconnaître au moins deux qualités : l’habileté – qui lui a permis de mettre un terme en douceur aux querelles interminables qui déchiraient la France (la Guerre de Cent Ans). Et l’intuition – qui l’a amené à faire confiance, en 1429, à la jeune Pucelle venue lui proposer son aide, mais aussi, trente ans plus tard, l’affaire est moins connue, à envoyer un simple graveur employé à la Monnaie de Tours, s’informer des secrets d’une nouvelle industrie qui lui paraissait pleine d’avenir : l’imprimerie.

C’est ce que nous révèle Philippe Deblaise dans un formidable roman historique – tout aussi historique que romanesque – consacré à un personnage oublié, Nicolas Jenson, qui fut pourtant un des plus grands typographes, imprimeur, éditeur et libraire de la Renaissance.

Lui-même libraire, expert en livres anciens, et bibliophile, Philippe Deblaise a l’art de nous plonger dans la prodigieuse effervescence de l’époque, et de raconter, dans un fourmillement d’anecdotes authentiques, l’extraordinaire aventure de ce Nicolas Jenson, né vers 1420 (dans l’actuelle Haute-Marne), employé comme graveur à Tours, d’où le roi l’envoie à Mayence en 1458, espionner – c’est le mot qui convient – un certain Johannes Gutenberg, qui vient de mettre au point une technique révolutionnaire de reproduction des textes, dont on ne pouvait jusque-là obtenir que de rares copies manuscrites.

Nicolas Jenson fera beaucoup mieux que percer les secrets de fabrication de Gutenberg : il améliorera beaucoup le procédé, fabriquera des polices de caractère plus lisibles – y compris le caractère dit « romain », que l’on emploie encore aujourd’hui –, puis ira chercher la fortune et la gloire en s’installant à Venise, qui est alors l’épicentre de la vie commerciale et culturelle en Europe. Il y fera quelques grandes rencontres (le peintre Giovanni Bellini, le jeune Leonardo da Vinci) et y vivra quelques belles aventures amoureuses.

Car ce Nicolas Jenson n’appréciait pas seulement la forme des lettres, le toucher des papiers, l’odeur des encres : il était aussi irrésistiblement attiré par les femmes. C’est du moins ce que raconte, avec une infinie délicatesse, l’auteur de cette belle biographie à laquelle il a donné l’apparence d’une autobiographie.Libraire et bibliophile, Philippe Deblaise est, par ailleurs, éleveur de chevaux (arabes) : c’est son autre passion. Je le soupçonne alors d’avoir adopté une fameuse recette rapportée d’Algérie dans les années 1850 par Eugène Daumas, un général y ayant fait l’essentiel de sa carrière : le bonheur sur terre, dit (à peu près) ce précepte, se trouve sur le dos d’un cheval, entre les seins d’une femme, ou dans le farfouillement des livres.

MOI, NICOLAS JENSON, LIBRAIRE À VENISE EN 1470 de Philippe Deblaise. Liralest/Le Pythagore éditions. 400 pages/23 euros.

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