Quand l’Otan vassalise les Européens

Face aux exigences américaines, les membres de l’Otan ne gagneraient-ils pas prendre leurs distances avec l’Alliance atlantique ? 

Bien sûr nous avons une dette. Les Américains nous ont sauvés du nazisme. Puis, grâce à leur bombe, ils nous ont évité la « démocratisation populaire » chère à Staline. L’Alliance atlantique, a priori, est aussi une bonne institution. Regrouper les démocraties occidentales face aux totalitarismes est naturel. Qu’une alliance politique cherche à organiser et à coordonner ses différentes forces militaires est aussi dans la nature des choses. Que dans une alliance il y ait un guide, un primus inter pares, est normal. Mais lorsque ce guide devient hégémonique et n’utilise l’alliance que pour servir ses propres intérêts il faut réagir.

Aujourd’hui, les dirigeants de l’OTAN – l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord – prennent de moins en moins de précautions pour faire comprendre aux « alliés » des Américains qu’ils doivent dépenser beaucoup plus pour la défense commune et surtout qu’ils se doivent d’acheter essentiellement du matériel américain.

Hégémonisme américain

Premier point de la démonstration : sans nous vous n’êtes rien. Ecoutons Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’Otan, le Norvégien plus Yankee que les Yankees : « En réalité l’Union européenne ne peut pas protéger l’Europe. » Prise à la lettre, cette déclaration faite à Munich, le 17 février dernier, lors de la Conférence sur la Sécurité, n’est pas contestable. L’Union européenne est une organisation qui n’a pas de forces militaires significatives, mais les différents pays qui la composent ont, au total, des forces très supérieures à celles de la Russie et dépensent pour leurs forces armées beaucoup plus que Vladimir Poutine pour les siennes. Certes, les pays européens ne sont pas organisés à la manière de l’Otan, ils ne pourraient pas unir leurs forces pour attaquer le grand méchant russe, mais ils n’en ont aucune envie. En revanche, leurs moyens de défense seraient largement suffisants pour empêcher l’invasion de leurs territoires. Surtout si on ne les empêchait pas de s’unir.

Deuxième point : vous n’êtes pas organisés… continuez ! La création d’une défense européenne serait très négative car elle risquerait de « fragiliser les relations transatlantiques et de doublonner avec ce que fait déjà l’Otan. » (Stoltenberg le même jour)

Troisième point : on se ruine pour vous, il vous faut participer plus au fardeau. James Mattis, le chef du Pentagone, a été très clair à Bruxelles le 15 février : « Les Européens doivent partager les mêmes charges et les mêmes obligations que les militaires américains. »

Quatrième point : vous devez acheter américain. James Mattis encore : « Il ne peut être question qu’un éventuel développement d’une défense européenne puisse porter le moindre tort à l’industrie américaine de la défense. »

Pour de multiples raisons, Charles de Gaulle avait décidé, en 1966, de quitter l’organisation militaire intégrée de l’Otan. Ce faisant, il a contribué à la survie de l’industrie française d’armement et même à celle de l’ Europe. Maintenant que Nicolas Sarkozy nous a fait réintégrer le giron otanien faudrait-il s’en séparer de nouveau ? Je ne le crois pas, car ce serait pratiquement abandonner l’Europe à l’hégémonie des industriels américains.

En revanche, il faut lutter de l’intérieur, conserver l’esprit du général de Gaulle et se révolter contre les abus de l’Otan et de ses maîtres. Macron réussira-t-il à convaincre ses pairs ? Espérons.

Question subsidiaire. Plutôt que de chercher à vassaliser toujours plus les Européens, Jens Stoltenberg ne ferait-il pas mieux de s’intéresser à l’invasion de la Syrie par la Turquie, membre de l’Otan, pour y massacrer les Kurdes qui furent, de loin, les combattants les plus efficaces contre Daech ?

Par Etienne Copel

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